Le message du salut implique-t-il une capacité à juger toute forme d’aliénation, d’oppression et d’injustice ? Le salut devrait-il nous transformer radicalement dans notre manière d’assumer nos responsabilités personnelles et sociales ? Devons-nous avoir peur de dénoncer le mal et l’injustice où qu’ils se commettent ? Quand vous voyez une injustice commise devant vous, comme réagissez-vous ?
A chacun sa manière de comprendre et d’aborder ces questions. Mais une chose est sûre : notre salut a des implications personnelle et sociale.
Évangélisation et action sociale
Souvent, un débat se soulève entre évangélisation et action sociale. Pour certains, l’évangélisation n’est pas l’action sociale. Pour d’autres, l’action sociale est une forme d’évangélisation. En fin, d’autres soutiennent que les deux concepts sont comme les deux revers d’une même médaille. Cette dernière catégorie soutient l’équation suivante : proclamation plus démonstration (action sociale) égalent évangélisation. Dans ce débat, La Déclaration de Lausanne se positionne en ces termes :
…La réconciliation de l’homme avec l’homme n’est pas la réconciliation de l’homme avec Dieu, l’action sociale n’est pas l’évangélisation, et le salut n’est pas une libération politique. Néanmoins, nous affirmons que l’évangélisation et l’engagement sociopolitique font tous deux partie de notre devoir chrétien1…
A bien comprendre la Déclaration, l’évangélisation est d’abord et avant tout la proclamation du message du salut. Elle doit se démarquer de l’action sociale. C’est tout à fait correct puisque n’importe quel organisme au monde peut faire de l’action sociale ou prendre des engagements sociaux.
Si l’Evangélisation se résumait à l’action sociale, l’Eglise ne serait qu’une simple organisation sociopolitique comme toute autre.
Cependant, si l’évangélisation n’est pas une libération politique, elle a bien sûr des implications politiques. Le ministère de Jésus illustre très bien ce point. Jésus avait une mission à accomplir, consistant à chercher et sauver ce qui était perdu. Il apportait une libération d’abord spirituelle. C’est pourquoi, quand certains voulaient L’utiliser pour chambarder la domination politique romaine, Il déclara que son pouvoir n’était pas de ce monde. Il n’était pas venu pour remplacer l’Etat ou changer l’organisation politique.
Toutefois, Jésus ne restait pas insensible face au mal, à l’injustice, à la corruption, aux problèmes de leadership et aux différentes formes de maladies auxquelles les gens de son époque étaient assujettis. Ainsi, dès sa première lecture publique de la Bible juive, Il confirma qu’en Lui la prophétie du prophète Esaïe était accomplie :
L’Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu’il m’a oint pour annoncer une bonne nouvelle aux pauvres ; Il m’a envoyé pour guérir ceux qui ont le cœur brisé, pour proclamer aux captifs la délivrance, et aux aveugles le recouvrement de la vue, pour renvoyer libre les opprimés, pour publier une année de grâce du Seigneur.2
Donc, la toile de fond du ministère terrestre de Jésus était la proclamation du message du royaume des cieux et la libération intégrale du pécheur. Il avait de la compassion pour les nécessiteux, guérissait les malades, chassait les démons et nourrissait des foules, etc.
L’évangélisation peut prendre plusieurs formes, comme la fondation des écoles, la construction d’hôpitaux, la fondation des orphelinats, la visite des malades dans les hôpitaux et des prisonniers dans les prisons et le service rendu à la communauté. Il s’agit d’un ensemble d’actions motivé par l’amour et dont l’aboutissement est la proclamation de l’Évangile en parole ou de manière muette.
Nous devons toutefois éviter de transformer l’église en une ONG ou une béquille sociale en temps de crises. Le chrétien n’est pas un simple activiste social, mais un ambassadeur de Jésus qui doit porter un regard transformateur sur les communautés. L’engament social doit être une conséquence ou une démonstration de la proclamation de la foi. Car, selon Jacques, la foi sans les œuvres est morte.
Le règne de la justice
Quand nous voyons une injustice commise devant nous comme chrétiens nous devons être interpelés. Car, comme Jésus, nous devons désirer que la justice règne dans nos sociétés. Ce désir de justice découle de la nature même de Jésus, le Roi-libérateur. Notre mode de vie ne doit pas être en décalage avec la volonté de Dieu pour les habitants de la terre. Parce que Dieu est juste, nous, en tant que ses enfants, devons produire des fruits de justice.
Voir des hommes et des femmes se libérer de toutes formes d’oppression, n’est-ce pas ce que nous voulons ? Voir et œuvrer pour que la justice sous toutes ses formes règne sur la terre, n’est-ce pas ce après quoi notre âme soupire-t-elle ?
Nous ne pouvons pas cautionner l’injustice et la corruption où et par qui elles sont commises. Nous ne devons pas nous contenter de les dénoncer, mais de nous positionner pour la justice. Car souvent on nous connait pour ce que nous sommes contre, mais pas nécessairement pour ce que nous sommes pour.
La dignité intrinsèque de l’être humain
Au nom de la dignité intrinsèque de chaque personne humaine créée à l’image de Dieu, nous devons tout mettre en œuvre pour restaurer cette dignité là où elle est vilipendée et la proclamer là où elle ignorée. C’est ainsi que la Déclaration de Lausanne soutient :
…L’homme étant créé à l’image de Dieu, chaque personne humaine possède une dignité intrinsèque, quels que soient sa religion ou la couleur de sa peau, sa culture, sa classe sociale, son sexe ou son âge ; c’est pourquoi chaque être humain devrait être respecté, servi et non exploité…
Notre conception de l’être humain a des conséquences. Elle détermine notre manière de l’aborder et de le traiter. Si nous pensons qu’il n’est qu’une machine, un tas de boue avec seulement un souffle, c’est normal que nous l’exploitions. Mais telle n’est pas la vision de Dieu. La dignité inhérente de l’être humain s’explique uniquement parce que celui-ci a été créé à l’image de Dieu.
Si nous comprenons bien l’anthropologie biblique, cela changera absolument tout. Le climat de travail, notre leadership, le milieu familial et tous nos rapports sociaux seraient radicalement différents.
L’être humain a des droits inaliénables et indivisibles. C’est pourquoi, quand nous violons la dignité de l’être humain, nous devrions nous attendre à des réponses de la part de son Créateur et de la part de celui à qui le mal a été fait.
La vie de l’être humain est sacrée et précieuse. Voilà ce qui fait toute la beauté et la particularité du message de l’Évangile. Tel devrait être notre message et notre combat quotidien dans un monde remplit d’injustice, de barbarie et d’hostilité.
Votre vie a de l’importance. Votre vie, comme toute autre vie, compte.
Dans l’histoire de l’humanité, un homme a émergé, un Afro-américain du nom de Martin Luther King Jr. La situation de ségrégation raciale qui gangrenait la société américaine l’interpelait. Il a fait un rêve de voir cesser cette situation honteuse où noir et blanc pouvaient cohabiter ensemble, s’asseoir dans le même bus, fréquenter les mêmes universités et avoir les mêmes privilèges. Il a été assassiné pour cette cause. Le racisme n’a pas complètement cessé aux États-Unis environ 60 ans plus tard. Mais, à cause de son influence de grands pas ont été franchis.
Mais saviez-vous que Dr. Martin Luther King était chrétien, pasteur ? Oui il l’était. Il ne voyait dans sa Bible aucune contradiction entre le combat qu’il menait et l’éthique biblique. Pourquoi devrions-nous en voir aujourd’hui ?
L’Évangile du royaume
Le salut a des implications personnelles, sociales et pratiques. Il est de nature à transformer notre mentalité et notre rapport avec notre communauté. Nous sommes libérés pour ensuite libérer les autres, chacun dans sa sphère et à son niveau d’influence. C’est ce que j’appelle l’effet domino du salut. Dans ce contexte, le Dr. Richard Ramsay écrit :
Notre salut implique notre réconciliation avec les autres personnes, notre réconciliation avec la nature, et notre relation avec nous-mêmes, toutes les dimensions qui étaient affectées par la chute. En même temps que nous apportons l’Évangile dans le monde, nous cherchons à restaurer toute la société, de fond en comble. Il commence dans le cœur de l’individu, touchant la famille, en passant par l’église, pour atteindre toute la société3.
L’Évangile du royaume répond aux besoins globaux des communautés. L’individu sauvé fait rencontre avec le Créateur de l’univers, Celui qui soutient toute chose. Par conséquent, s’il parvient à collaborer avec Lui dans l’obéissance, il fera en sorte que la volonté de Dieu soit faite dans sa communauté comme elle est faite dans les cieux.
Dans sa mission prophétique, la personne régénérée est appelée à dénoncer les maux sociaux en proclamant les oracles de Dieu partout où elle se trouve sur la terre. C’est en s’impliquant dans tous les aspects de la cité qu’elle réussira à établir le royaume de Dieu. Ce n’est pas le moment de battre en retraite.
Le message qu’a confié Dieu à son prophète Jérémie pour exhorter les Juifs en captivité à Babylone de rechercher le bonheur de la ville doit être on ne peut plus d’actualité.
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Leçon essentielle à retenir: Nous sommes libérés pour ensuite libérer les autres, chacun dans sa sphère et à son niveau d’influence.
Question de réflexion : Comment décririez-vous l’impact social de votre libération par le Seigneur ?
Prière profonde : Dieu des humains, merci parce que, dans ton amour incommensurable, Tu m’as sauvé et libéré. Je reconnais que ton salut est intégral. Dévie tout mensonge de l’ennemi voulant lier mes pensées. Fais que je sois un agent transformateur de ma communauté. Car Tu m’as libéré pour aussi libérer les autres à tous les niveaux. Qu’il en soit ainsi Père. Au nom de Jésus ! Amen !
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Notes et références
1. La Déclaration de Lausanne de 1974, extrait du point 5, Responsabilité sociale du chrétien
2. Luc 4 versets 16 à 19
3. Richard Ramsay. Intégrité intellectuelle, p.36