Abstract
Cet article explore l’épistémologie biblique, définie comme une perspective chrétienne sur la connaissance et la vérité. Il aborde les questions fondamentales de l’épistémologie, telles que “Que pouvons-nous savoir?” et “Comment acquérir un savoir certain?”. En se basant sur des principes bibliques, l’auteur soutient que toute connaissance, qu’elle soit scientifique ou théologique, provient de Dieu. L’auteur prône une approche ouverte, encourageant la lecture d’œuvres non chrétiennes et scientifiques pour une compréhension plus complète du monde. L’article distingue entre la science, qui s’intéresse au “comment”, et la théologie et la philosophie, qui explorent le “pourquoi”. Il critique le naturalisme scientifique, affirmant que certaines vérités ne peuvent être saisies que par la foi. L’épistémologie biblique reconnaît aussi la limite de la connaissance humaine, affirmant que seul Dieu détient la vérité ultime.
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Epistémologie vient du grec episteme, signifiant connaissance, savoir. Parfois on voit l’épistémologie comme théorie de la connaissance ou du savoir, parfois comme critique de la connaissance. L’épistémologie s’intéresse à deux éléments majeurs: le savoir et la vérité.
L’épistémologie s’intéresse à certaines questions essentielles comme : Que pouvons-nous savoir? Comment peut-on savoir? Que pouvons-nous savoir de manière certaine ? Existe-t-il quelque chose qui est toujours vrai ?
Nous pouvons définir l’épistémologie biblique comme étant une perspective biblique de la science, de la connaissance ou du savoir. Certains éléments que nous allons considérer ici sont tirés de notre ouvrage « Une pédagogie chrétienne adaptée aux néophytes spirituels ». Le premier élément à prendre en considération par rapport à l’épistémologie biblique, c’est la Bible.
L’origine de toute connaissance
La Bible est le centre d’intégration de toute connaissance, selon George Knight. L’épistémologie biblique tient compte de la réalité selon laquelle toute connaissance vient de Dieu. Voilà pourquoi, dans nos efforts pour construire une vision biblique du monde, nous ne devons pas seulement lire des ouvrages de théologie, mais nous devons être assez ouverts pour lire des auteurs non chrétiens, des ouvrages de science et de fiction. Kevin J. Vanhoozer, en décrivant le concept de pasteur-théologien, écrit : « Pour comprendre toutes choses en relation avec le Christ ressuscité, il faut penser davantage en termes de partie et de totalité. Plus précisément, il faut une lecture holistique et une connaissance théologique (1) de la Parole de Dieu, (2) du monde humain et (3) des paroles humaines sur le monde humain[1].
Toute connaissance vient de Dieu, qu’il s’agisse de la connaissance scientifique, de la connaissance mathématique, de la connaissance médicale ou médicinale, de la connaissance archéologique, de la connaissance artistique, etc. Même quand une personne scientifique n’est pas chrétienne, étant donné qu’elle a été créée à l’image de Dieu, son savoir vient de Dieu. Par conséquent, nous ne devons diaboliser aucun penseur non chrétien. Évidemment, quand la connaissance se trouve entre les mains des gens qui n’ont pas la crainte de Dieu, cela peut causer des dégâts. Rabelais l’a bien dit: « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme. »
Une épistémologie biblique part d’abord avec l’idée de Dieu. Dieu, être personnel, nous a créés en nous donnant des potentiels. Par conséquent, toute connaissance vient de Lui. Tout ce que nous pouvons savoir sur l’univers vient de Dieu. Dieu est rationnel et l’univers est intelligible. L’univers, un système ouvert, est dirigé non seulement par Dieu Lui-même, mais aussi par des lois naturelles fonctionnant sur une base régulière. Le réglage fin que nous observons dans l’univers ne peut être que l’œuvre d’une intelligence suprême, d’une cause première vivant en dehors du temps, de l’espace, de l’énergie et de la matière. Par conséquent, ce Dieu doit être forcément tout-puissant et éternel.
Si nous pouvons étudier l’univers, plus précisément la création, c’est parce que Dieu l’a conçue ainsi, c’est-à-dire conçue pour être étudiée. Tout ce que nous pouvons savoir sur l’univers vient de Dieu.
Modes d’acquisition de connaissance
Il existe tout au moins deux modes d’acquisition de connaissances: la science et la théologie ou la philosophie.
La science s’intéresse à la question « comment », c’est-à-dire comment l’univers est organisé, comment les choses fonctionnent. C’est un mode d’acquisition de connaissance a posteriori, c’est-à-dire une connaissance empirique, sujette de l’expérience. Tandis que la théologie et la philosophie répondent à la question « pourquoi ». Par conséquent, nous ne devons pas mélanger ces deux disciplines, sphères ou modes d’acquisition de connaissance. Nous ne devons pas mélanger ces deux questions, le « comment » et le « pourquoi ». Si la théologie et la philosophie sont des modes d’acquisition de connaissances (a priori: connaissance indépendante de l’expérience sensible et logiquement antérieure) au même titre que la science, nous pouvons dire à ce niveau que le naturalisme scientifique ou même une pensée matérialiste n’a pas vraiment raison.
Que dit le naturalisme scientifique ? Cette tendance soutient que la science est la seule façon ou la seule méthode d’acquisition de connaissances. La matière est tout ce qui existe. Nous devons admettre qu’il y a des choses que la science ne peut pas expliquer, comme le bien et le mal par exemple. Par rapport à ces questions et tant d’autres, il faut avoir recours à la philosophie et à la théologie. A chaque mode sa place.
L’épistémologie biblique
L’épistémologie biblique, du point de vue de la théologie, soutient que la connaissance de la création de l’univers par la parole est acquise par la foi (Hébreux 11.1, Genèse 1 et 2)).
Évidemment, il y a lieu de considérer des avancées ou positions scientifiques comme le Big Bang, etc. Mais l’objectif de la Bible n’était pas de nous faire un exposé scientifique sur l’origine de l’univers. Il y a des questions que nous nous posons aujourd’hui que Moïse, l’auteur du Pentateuque, ne se les posait pas certainement. Moïse n’avait pas comme préoccupation de faire un exposé scientifique dans son récit de la création. Donc, la Bible nous dit tout simplement que c’est par la foi que nous savons que le monde a été créé par la parole. Nous ne pouvons pas scientifiquement démontrer cela.
La Bible ne nous fournit pas tous les détails sur le comment de l’univers. C’est pourquoi nous avons recours à la science, évidemment, pour comprendre plus ou moins comment cela s’est passé et comment l’univers fonctionne.
L’épistémologie biblique suggère aussi que toute connaissance est limitée. En d’autres termes, comme l’a dit Paul, nous connaissons en partie (1 Corinthiens 13.9). En conséquence, nous devons faire très attention au scientisme, prônant que les progrès de la science constituent la clé de tous les problèmes humains. Ce que la science ne peut pas expliquer maintenant, elle le fera plus tard. Rien ne peut garantir que ce que la science ne peut pas expliquer aujourd’hui, elle pourra l’expliquer plus tard. Nous connaissons en partie. Notre connaissance est très limitée. Nous devons le reconnaître. La science, se basant sur des données factuelles, observables, et des méthodes, ne répond pas à tout.
Yada
Pour clore, évoquons le concept de Yada, un mot hébreu pour traduire connaissance.
Yada en hébreu ne traduit pas seulement le fait de connaître, mais aussi le fait de mémoriser. Yada évoque surtout l’idée d’intimité, d’une relation. Quand nous disons que nous connaissons quelque chose, nous voulons dire que nous avons une relation avec cette chose. De même, quand nous disons que nous connaissons Dieu, nous voulons dire que nous avons une relation personnelle avec Dieu.
[1] Kevin J. Vanhoozer and Owen Strachan. The Pastor as public theologian: Reclaiming a lost vision (Grand Rapids, MI: Baker Academic) 2015, p.113