colorful, dreamcatcher, culture-1868353.jpg

Une perspective biblique de la culture

Une perspective biblique de la culture est un article écrit par Windel Benjamin Etienne pour vous aider à mieux saisir le rapport entre l’Évangile et la la culture.

Si nous ne sommes pas créatifs pour Dieu, l’Ennemi gagnera du terrain, et l’art sera exploité de plus belle. Il nous faut des chrétiens pour remplir les académies de ce monde afin d’être le sel et la lumière de la vie culturelle.[1] Leen La Rivière

Le projet de Dieu est de racheter les cultures. Discipliner les nations (ευνος en grec) signifie poser les principes du royaume et établir une vision du monde biblique comme fondation, ou ethos (ευος en grec) d’un peuple.[2]  Darrow Miller

Objectifs

A la fin de cet article, vous devriez être en mesure :

  • de développer une conception biblique de la culture/de l’art ;
  • de formuler des principes bibliques liés à la culture/l’art en étudiant des textes bibliques.
  • de développer votre créativité  à la gloire de Dieu.

    Elles sont nombreuses les idées reçues sur le rapport entre la culture et la foi chrétienne. Il s’agit d’une thématique épineuse ayant fait l’objet de beaucoup de recherches et de discussions tout au long de l’histoire du christianisme.artist, pen, painting-3008031.jpg

    Le chrétien, au même titre que n’importe quel citoyen, fait face à des réalités culturelles. Cependant, si ses préoccupations culturelles ne sont pas prises en compte théologiquement, il est difficile que sa foi chrétienne soit vraiment épanouie.

    Nous sommes des êtres sociaux et culturels.

Chrétien dans mon pays et culture de mon pays

    Quelle est votre conception de la culture ? Pensez-vous qu’elle est mauvaise ? Comment comprenez-vous l’anticonformisme chrétien ? Vous sentez-vous culturellement déraciné en devenant chrétien ?

    J’ai grandi dans une culture dominée par le christianisme et le Vaudou. D’une part, entre ces deux visions du monde existe le syncrétisme religieux, notamment entre le catholicisme et le Vaudou. Cependant, force est de constater que les chrétiens catholiques sont plus ouverts à la culture, avec évidemment des dérives qui s’y associent parfois. 

    D’autre part, existe une tension, notamment entre le Vaudou et le protestantisme. Dans ce cas, un très large éventail de chrétiens protestants pense que la culture est mauvaise. Ils en ont peur. Sans s’en rendre compte, beaucoup développent une attitude superstitieuse par rapport à la culture.

    Hérités, dans une certaine mesure, d’une adaptation inappropriée à la culture haïtienne et de l’ethnocentrisme dont faisaient et font encore montre certains missionnaires chrétiens occidentaux, ces chrétiens haïtiens sont déracinés de leur propre culture. Quand ils n’embrassent pas aveuglement une certaine culture chrétienne dite occidentale, ils en subissent subtilement les influences dans leur façon de croire, d’agir et de vivre. Ils expérimentent une crise identitaire. 

    Toutefois, il faut reconnaître que chaque missionnaire, issu de pays du Nord ou du Sud, porte en lui son identité culturelle. Celle-ci n’est pas toujours imposée au peuple à qui il veut communiquer l’Évangile. En contact avec la vérité, toute culture est appelée à faire des ajustements dans son mode de pensées et de comportements sans aucune imposition.

    Les partisans du Vaudou, certains intellectuels de la nouvelle génération, conçoivent le christianisme comme un instrument de domination entre les mains de l’Occident, le décrivant comme une religion importée (d’Europe). Ils pensent que le Vaudou est la culture haïtienne ; ce qui est toutefois réductionniste. Face à de telles tensions, mon positionnement était difficile et j’étais sans de bonnes orientations. J’étais très méfiant vis-à-vis de ma propre culture.haiti, flag, america-3134944.jpg

    Je me souviens qu’en 2016, pendant mes deux semaines ministérielles au Mexique, un jour nous étions allés dîner chez une famille d’origine asiatique aisée.

    Satisfaits de la diversité des plats copieux et de l’architecture de la maison, sur le chemin du retour c’était la grande excitation. C’était comme un semi bal dans la voiture. Tout le monde chantait et dansait une musique de Justin Bieber, sauf moi. Ebahis, mes camarades, Américains, m’ont demandé : « En Haïti, vous ne dansez pas Windel? » Choqué par la question, j’ai répondu grossièrement : « Nous dansons, mais pas des musiques païennes, comme ce que vous êtes en train de chanter. »

    Sans vouloir vous choquer, un chrétien peut-il danser et chanter une musique païenne ou dite païenne ? Creusons pour comprendre ce qu’est la culture.

    Historiquement, les chrétiens ont adopté cinq attitudes à l’égard de la culture. Je mets ces attitudes en relation avec 5 modèles de relation entre le Christ et la culture développés par Richard H. Niebuhr dans son grand classique.[3]

1) Attitude méprisante et méfiante

Les chrétiens ayant cette attitude pensent que la culture est foncièrement mauvaise et que la foi chrétienne est contre. Par conséquent, ils préfèrent battre en retraite. Certains vont jusqu’à se séparer physiquement du monde. Le monachisme en est un exemple probant. C’est le modèle Le Christ contre la culture.

2) Attitude conformiste et complaisante

Ces chrétiens pensent que la culture est bonne. Pour eux, le mieux est de faire corps avec les tendances culturelles au lieu de lutter contre elles ou courir pour elles.

    Ces chrétiens minimisent les effets du péché, pensant que Dieu est en train d’opérer dans et à travers la culture. C’est une sorte de syncrétisme. C’est un peu « A Rome on fait comme les Romains. » C’est le modèle Le Christ Dans la culture.

3) Attitude synthétique

Ces chrétiens croient que la culture est fondamentalement bonne, mais ce qu’il faut c’est de l’améliorer en y ajoutant une dose chrétienne. Parce que Christ, tout en étant dans la culture, la dépasse.

    Saint-Thomas d’Aquin et la tradition de la théologie catholique sont souvent présentés comme des exemples frappants de cette tendance dans leur conception de la foi et de la raison. C’est le modèle Le Christ au-dessus de la culture.

4) Attitude paradoxale et ambivalente

Ces chrétiens pensent que même si la culture est mauvaise, il faut inévitablement faire avec en s’impliquant. Il faut se soumettre tant à Christ qu’à la culture, malgré l’opposition qu’il peut y avoir entre les deux.

    Martin Luther, père de la réforme protestante, est souvent considéré comme un exemple de cette tendance. Il oppose le royaume de Dieu et le royaume du monde comme étant un dilemme et crie de manière désolante qu’il est impossible de vivre sans péché. C’est le modèle Le Christ et la culture en paradoxe.

5) Attitude transformatrice positive

Les tenants de cette tendance croient que la culture est mauvaise, mais la grâce de Dieu y est présente pour la transformer positivement. C’est-à-dire que les chrétiens doivent vivre dans la culture pour travailler à sa transformation.

    Donc, ces chrétiens, par rapport à la culture, croient qu’il ne faut pas battre en retraite (Attitude 1), s’y conformer en la soutenant (attitude 2), y ajouter tout simplement un peu de grâce (attitude 3), ni l’accepter et la soutenir à contrecœur (attitude 4).

    Jean Calvin est présenté comme un champion de ce modèle lorsqu’on considère ses incontestables travaux réalisés dans la ville de Genève, en Suisse. C’est le modèle Le Christ Transforme la culture.

    Résumé des cinq modèles de Richard H. Niebuhr mis en relation avec les cinq attitudes :

1. Le Christ Contre la Culture : Attitude méprisante et méfiante

2. Le Christ Dans la Culture : Attitude conformiste et complaisante 

3. Le Christ Au-Dessus de la Culture : Attitude synthétique

4. Le Christ et la Culture en Paradoxe : Attitude paradoxale  ou ambivalente

5. Le Christ Transforme la Culture : Attitude transformatrice positive

    D’après vous, laquelle de ces cinq attitudes ou lequel de ces cinq modèles reflète le mieux la pensée biblique ? Avant de vous donner mon opinion, posons-nous la question : qu’est-ce que la culture ?

Tentative de définition de la culture

    Selon la Déclaration de Mexico sur les politiques culturelles, l’UNESCO[4] définit la culture en ces termes :

La culture, dans son sens le plus large, est considérée comme l’ensemble des traits distinctifs, spirituels et matériels, intellectuels et affectifs, qui caractérisent une société ou un groupe social. Elle englobe, outre les arts et les lettres, les modes de vie, les droits fondamentaux de l’être humain, les systèmes de valeurs, les traditions et les croyances.

    La deuxième définition, plus élaborée, est du dictionnaire La Toupie « Toupictionnaire » :[5]

La culture est l’ensemble des connaissances, des savoir-faire, des traditions, des coutumes, propres à un groupe humain, à une civilisation. Elle se transmet socialement, de génération en génération et non par l’héritage génétique, et conditionne en grande partie les comportements individuels.

La culture englobe de très larges aspects de la vie en société : techniques utilisées, mœurs, morales, mode de vie, système de valeurs, croyances, rites religieux, organisation de la famille et des communautés villageoises, habillement, etc.

On distingue généralement trois grandes formes de manifestation de la culture : l’art, le langage et la technique.

    De ces deux définitions, retenons les grands points suivants :

1) Dès qu’il y a un corps social, une société ou communauté humaine, il y a culture.

2) La culture est un tout englobant, difficilement cernable. Il n’y a pas que la religion ou les croyances religieuses. Evidemment les concepts philosophiques ou la religion est la vitrine de notre vision du monde et donc va obligatoirement influencer nos cultures sous quelque forme que ce soit.

3) Le concept de Dieu ou la notion de croyance religieuse est présente dans toute culture, aussi séculière soit-elle.

4) Aucune culture n’est religieusement et moralement neutre.

5) La culture est dynamique, et non statique.

6) La culture du corps social détermine et influe sur les valeurs, les attitudes et comportements.

7) Aucune culture n’est supérieure ou inférieure à une autre.

8) La culture d’un peuple s’extériorise, se manifeste forcément.

Évaluation et critique

    De tout ce qui précède, posez-vous les questions suivantes : par rapport aux définitions évoquées, d’après vous, d’où vient l’idée que le chrétien doit se méfier ou se retirer de la culture ? Qu’est-ce qui explique la tendance voulant faire croire que telle culture est supérieure à telle autre culture ?  Philosophiquement, une culture est-elle ou peut-elle être neutre ? Je vous invite à toujours avoir à l’esprit la cosmovision. Toute culture est soutenue par une cosmovision.

    Par rapport aux cinq attitudes évoquées précédemment, basées sur les modèles de Richard H. Niebuhr, je pense que les chrétiens qui affichent une attitude de retrait ou qui battent en retraite en prétendant que la culture est trop mauvaise, se trompent. En ayant une telle attitude, ils laissent le champ libre à la puissance du malin de dénaturer et de contrefaire tout ce que Dieu a créé et la beauté de toute culture.

    En outre, les chrétiens qui pensent pouvoir vivre dans l’isolement pour mener une vie sans péché tombent dans le piège de l’orgueil spirituel, de l’hostilité et de l’arrogance.

    En se retirant du monde, ils font passer Dieu pour menteur, Lui qui a dit que nous sommes le sel et la lumière du monde.[6] Ils vivent plutôt dans le déni le plus total, oubliant que non seulement l’homme est créé à l’image de Dieu, mais que Dieu est bon envers tous les humains.[7] Il communique Sa grâce à tout le monde.

    Ces chrétiens ignorent aussi que le péché est un état de rébellion. Il les accompagne partout où ils vont. Donc, on peut pécher contre Dieu même dans l’isolement le plus total. Car il commence d’abord au niveau de la pensée.

    Par contre, ceux qui pensent que la culture est tout à fait bonne en s’y conformant de manière aveugle perdent la pertinence du message de l’Évangile. Ils sont naïfs en minimisant l’étendue des dégâts causés par le péché depuis la chute d’Adam et Eve. Je les appelle des « chrétiens super héros. »

    L’homme, étant un être moral, est capable de bonnes actions et de créer des choses admirables. Il n’est pas tellement perverti au point que rien de bon ne peut venir de lui. Cependant, force est de constater que nous vivons dans un monde déchu. Le cœur de l’homme est tortueux et méchant.[8]

    Nous sommes appelés par Dieu à être anticonformistes au monde en ayant la capacité de discerner la volonté de Dieu par le renouvellement de l’intelligence.[9]

    Les chrétiens qui pensent que Christ est au-dessus de la culture produisent parfois un Christ transcendant, mais non immanent. Du coup, ils tombent dans le piège de la dichotomie. Ils scindent leur vie en vie spirituelle et vie séculière.[10] Dans ce cas, ils n’ont pas une vision biblique équilibrée du monde (de la culture).

    Ces chrétiens développent souvent de la haine contre la science par rapport à la Bible. Nous devons voir le monde tel que Dieu le voit et tout faire pour Sa gloire. Paul nous exhorte en ces termes :

Et quoi que vous fassiez en parole ou en œuvre, (en chantant, en créant des œuvres d’art, en dansant, etc.) faites tout au nom du Seigneur Jésus, en rendant par lui des actions de grâces à Dieu le Père.[11]

    Ceux qui affichent l’attitude paradoxale sont formidables à un certain point. Ils acceptent l’idée que nous vivons dans un monde déchu. Nous ne sommes pas des anges. Jésus nous y a laissé en demandant au Père de nous préserver du mal, en nous réconfortant par sa victoire sur le monde et en nous exhortant de surmonter le mal par le bien.[12]

     Ceux qui se soumettent aveuglement à la culture donnent l’impression que tout va bien dans le monde. C’est là que trébuchent les tenants de cette tendance.

    Enfin, les partisans de la tendance transformatrice positive. Je ne partage pas tout à fait l’idée que catégoriquement la culture est mauvaise au regard de toutes ses composantes. Même avant leur chute, Adam et Eve formaient un embryon de communauté où la culture était présente.

    Je pense que même après le péché, ce que Dieu a déclaré bon le reste encore. Je dirais plutôt que la culture humaine est la création dans son ensemble soumise à la vanité. Par conséquent les humains ne sont pas en mesure de créer une culture parfaite ou tout à fait bonne.

    Néanmoins, je pense que le cinquième modèle tient compte de trois vérités bibliques cruciales. Premièrement, l’être humain, créé à l’image de Dieu, avant la chute, a reçu un mandat culturel pour organiser l’espace social et développer sa culture. Ce mandat est aussi nôtre aujourd’hui.

    Deuxièmement, l’introduction du péché dans le monde a causé une cassure dans le développement et l’organisation parfaits de la société humaine. C’est là que le désenchantement culturel a commencé.

    L’être humain se trouve désormais dans l’incapacité de créer et de promouvoir une culture parfaite. Tout ce qu’il touche est inéluctablement affecté par le péché. Celui-ci affecte toutes ses relations : avec Dieu (dimension théologique/spirituelle), avec lui-même (dimension psychologique), avec ses semblables (dimension sociale ou sociologique), avec la nature (dimension écologique et économique).

    Le mandat culturel est terriblement affecté et l’imago Dei est détériorée. Il s’agit d’un conflit incroyable.

    Troisièmement, Jésus, le divin rédempteur, est venu dans le monde pour restaurer ce que le péché a causé comme dégâts. S’il n’y avait pas de dysfonctionnement, il n’y aurait aucune nécessité de rédemption. 

    Jésus est venu pour transformer le cœur de l’être humain. Une fois son cœur transformé, ses pensées et actions vont affecter toutes les autres dimensions. C’est la réconciliation totale.[13]    Voilà pourquoi le salut qu’offre Jésus est holistique. Il touche toutes les dimensions affectées par la chute. Ainsi, tout disciple de Jésus-Christ est appelé à grandir de manière intégrale.

    Faisant désormais partie de la famille de Dieu, de Son peuple et de Son royaume, le disciple transformé est porteur d’un message transformationnel. Il est appelé à travailler à la transformation de tous les secteurs de la vie en société pour la gloire du Champion Transformateur, Jésus-Christ.

    Ceux qui pensent que la culture est trop mauvaise et qu’en conséquence il faut la changer à partir d’un chambardement passent totalement à côté du combat spirituel. Ils ignorent absolument que les armes avec lesquelles ils doivent combattre ne sont pas charnelles. Le véritable ennemi n’est pas physique.

Alerte au déracinement culturel

    Le disciple de Jésus-Christ, tout en restant citoyen d’un groupe social déterminé, lequel influence d’une manière ou d’une autre ses comportements, doit s’impliquer dans la culture, non pas pour l’éradiquer, mais pour transformer les aspects culturels qui peuvent sembler en contradiction avec les valeurs chrétiennes qu’il adopte, pratique et défend.

    Le nouveau disciple de Jésus fait inévitablement face à un conflit de valeurs. Il doit pouvoir faire la part des choses sans pour autant se transformer en un ange terrestre ou un spiritualiste céleste sans patrie et sans culture.

    Jésus n’a jamais demandé à ceux qui veulent Le suivre de se déraciner culturellement. Ce qu’Il a toujours proposé c’est une transformation de cœur qui va sans conteste agir sur tous les aspects de la vie, conférant au régénéré une bonne conscience et la capacité de discerner les temps pour mieux se positionner pour Lui.

    L’Évangile est une Bonne Nouvelle. Qu’il reste l’Évangile. Que l’Évangile soit l’Évangile.

L’art comme une manifestation de la culture

    Quelle est votre perception de l’art ? Quand vous contemplez un joli tableau ou toute autre œuvre d’art plastique, une belle architecture, une beauté humaine magnifique, la diversité dans la nature, qu’est-ce qui vous vient à l’esprit ? A qui attribuez-vous tout cela ?

    L’art est l’un des aspects autour duquel fourmillent tant de mythes paralysants chez bon nombre de chrétiens. A travers l’histoire, deux grandes tendances s’imposaient. D’une part ceux qui ont vu dans l’art une dimension religieuse, un moyen de se rapprocher de Dieu, à travers la prière par exemple. D’autre part, ceux qui n’ont vu dans l’art aucune dimension religieuse. Certains, les iconoclastes, dans leur zèle, exagéraient jusqu’à détruire toutes formes d’œuvres artistiques.church, cathedral, street-4363258.jpg

   Cependant, nous devons reconnaître la contribution de l’Église catholique à la grandeur de l’art en Occident. Marc Fumaroli soutient la thèse suivante :

Les beaux-arts n’auraient jamais eu le développement qu’ils ont connu en Occident sans le soutien de l’Église catholique et une justification spirituelle. Ce soutien est justifié dans l’idée que les arts visuels nourrissent la foi des fidèles.[14]

    En matière de vision du monde, l’art n’est pas neutre. Les artistes par exemple sont influencés par une philosophie. Sans se rendre compte, ce sont surtout eux qui influencent le plus nos comportements. Il ne s’agit pas nécessairement des intellectuels ou académiciens.

    Oui, la musique et la peinture sont de grands vecteurs de transmission de vision du monde. Nous pouvons ajouter à cela les stars sportives.

Trois principes clés

1) Le Dieu de la création est le Dieu du vrai, du beau et de la diversité culturelle.

    Le premier artiste qui n’ait jamais existé est Dieu Lui-même. Dès le premier verset de la Bible, Genèse 1.1, Il se présente comme l’architecte, le Designer de l’univers.

    L’être humain, créé à l’image et à la ressemblance de Dieu, est un chef-d’œuvre divin. Vous êtes le produit du plus grand artiste de tous les temps. Vous êtes magnifique ![15]

    Ne lisez-vous pas Apocalypse 21 où il est question de nouveaux cieux et d’une nouvelle terre, de la nouvelle Jérusalem ? Je suis ébahi par la description que Jean en fait. Oh combien serons-nous bénis par le plus grand chef-d’œuvre artistique de tous les temps, dépassant de manière inimaginable ceux de Picasso et de toutes les autres grandes figures artistiques du monde réunies !

    Dans cette nouvelle Jérusalem sera vécue pour la première fois la plus grande manifestation de diversité culturelle de toute l’histoire de l’humanité.[16] Dieu aime la diversité.

2) Tout comme la connaissance scientifique, la connaissance ou l’intelligence artistique vient de Dieu.     

    Dieu est magnifique en sainteté. C’est Lui, pas Moïse, qui jeta son dévolu sur Betsaleel, fils d’Urie, fils de Hur, de la tribu de Juda et tous ses collègues pour procéder à la construction du tabernacle.[17] Pour s’y faire, Il lui a donné une l’intelligence artistique incroyable.

    Dans la description du tabernacle et des ustensiles qui allaient s’y trouver, l’expression : artistement travaillé est répétée 7 fois.[18] Au verset 29 du chapitre 37, le parfum odoriférant a été fait selon l’art du parfumeur.

    Dieu, en sa qualité d’artiste par excellence, ne saurait vous inviter à détester l’art et à rejeter les œuvres    d’art de votre culture. Alfred Kuen souligne :

L’homme créé à l’image de Dieu a part à sa créativité. Par la création artistique, il reconstitue son monde et donne aux autres joie, ressourcement et détente. Il fait découvrir la beauté et la gloire de Dieu et incite à la louange et l’adoration. L’art peut ouvrir l’esprit à l’Évangile et l’orienter vers ce qui est noble, pur et vrai. Il peut aussi nous ouvrir les yeux sur la misère d’un monde sans Dieu et créer une aspiration à la rédemption sans la procurer.[19]

3) L’art est une bénédiction, et non une malédiction, voire une œuvre satanique.

    Le réformateur Jean Calvin a dit : « Toute œuvre d’art, même accomplie par des non-croyants, est un don du Saint-Esprit. »[20] Le chrétien ne fait que rendre célèbre le Diable en lui attribuant la paternité à toute œuvre artistique. En bon profiteur, il s’arrange pour déposer son empreinte sur l’art à ses propres fins, qu’il s’agisse de la dance, de la musique, de l’architecture, de la sculpture ou de la peinture.

    Alors, en essayant de détruire des formes d’idolâtries, nous devons faire très attention de ne pas occasionner plutôt la destruction de toutes œuvres artistiques. N’est-ce pas une telle pensée qui animait beaucoup de chrétiens pendant et après la réforme protestante du 16e siècle ? Oui, beaucoup avaient l’engouement de détruire les images présentes dans les édifices catholiques.[21]

    Toutefois, il est aussi important de reconnaître que beaucoup de ces œuvres d’art, au lieu de favoriser la croissance spirituelle des croyants, les poussaient plutôt à une forme d’idolâtrie. On se rappelle le serpent d’airain de Moïse qui, au départ était une œuvre d’art destinée à amener la guérison de ceux qui avaient été piqués par les serpents venimeux. Par la suite ce même serpent est devenu un fétiche qui a dû être détruit. Il devenait objet de dévotion.

    Je laisse encore la place à Leen La Rivière pour vous bouleverser l’esprit par ses pertinentes questions à partir de ses études sur 2 Rois 4.38-41 :[22]

Combien d’entre nous serions tentés de rejeter notre culture et de nous en détourner, car elle nous semble empoisonnée ? Pourquoi ne pas ajouter un peu de farine ? Pourquoi ne pas nous battre pour neutraliser les forces des ténèbres ?

    Ce que Jésus attend de nous, de vous, en tant que son disciple, c’est de Lui rendre gloire en tout et pour tout. Nous L’adorons en contemplant un magnifique tableau, en travaillant artistement tout ce que nous faisons, dans l’église et en dehors de l’église. A ce titre, Albert E. Greene écrit : « Magnifier Dieu dans nos vies constitue l’essence de l’aspect de l’expérience et relève de la responsabilité de chacun »[23]

    N’oubliez jamais que « l’excellence honore Dieu et inspire les hommes. » Quelle devrait être la finalité de notre art en tant que chrétien » Francis Schaeffer nous en parle : 

Un chrétien devrait utiliser ces arts à la gloire de Dieu, pas seulement comme des traités, quoi que, mais comme des éléments de beauté à la louange de Dieu. Une œuvre d’art peut être une doxologie en elle-même […][24]  

    Nous devons être de ceux qui valorisent l’art et en font la promotion. Malheureusement beaucoup de nos artistes chrétiens sont mal vus et maltraités dans nos églises. Nous oublions qu’ils exercent un ministère noble, au même titre qu’un pasteur. De leur côté, les artistes chrétiens doivent faire très attention à leurs attitudes et comportements. Je vous invite à méditer sur cette formidable déclaration du Troisième Congrès de Lausanne pour l’évangélisation du monde (2010) :

Dans le monde de la mission, les arts sont une ressource inexploitée. Nous encourageons activement une plus grande implication chrétienne dans les arts.
Nous avons soif de voir, dans toutes les cultures, l’Église s’engager énergiquement dans les arts comme contexte pour la mission, en :
1. faisant entrer à nouveau les arts dans la vie de la communauté de foi comme composante valable et précieuse de notre appel de disciple;
2. soutenant ceux qui manifestent des dons artistiques, en particulier nos frères et sœurs dans le Christ, pour qu’ils s’épanouissent dans leur travail;
3. laissant les arts servir d’environnement favorable où nous pouvons donner de la place à notre prochain et à l’étranger pour apprendre à les connaître ;
4. respectant les différences culturelles et célébrant les expressions artistiques autochtones.

Un appel à rejeter toutes formes d’idolâtrie

    Vous êtes invités à rejeter toute forme d’idolâtrie dans votre vie et tout élément de votre culture, influencé par le péché, qui ne rend pas gloire à Jésus, votre nouveau Maître et Modèle parfait. Le corps social ne va pas toujours dans cette direction. La perversion culturelle gagne du terrain. A ceci, réfléchissons sur cette déclaration du professeur D. A. Carson :

Nous dérivons vers le compromis, et nous appelons cela tolérance ; nous dérivons vers la désobéissance, et nous appelons cela la liberté ; nous dérivons vers la superstition, et nous appelons cela la foi. Nous aimons l’indiscipline du manque de maîtrise et nous appelons cela relaxation. Nous glissons vers l’impiété et nous nous convainquons d’avoir été libéré.[25]

    Attention aux dérives !

Résumé conclusif

    Nous sommes invités à rendre gloire à Celui qui est l’Auteur de toute intelligence et connaissance artistique. Ne donnons pas au Diable, notre adversaire et l’adversaire de tout ce que Dieu a créé de bon et de beau, la place qui ne lui est pas due.

    Dieu vous place dans votre culture pour l’influencer. La foi chrétienne n’a pas besoin de dénaturation et de déracinement culturels pour être vécue pleinement et en toute liberté. Vous êtes transformés, mais non déformés, pour transformer.


[1] LA RIVIERE, Leen. Une Créativité Royale : les principes bibliques de l’art et de la créativité, Continental Sound/ Christian Artists Europe, 2005, p.11

[2] Darrow MILLER. Faites des nations mes disciples : clés pour une réforme de nos sociétés, Editions Jeunesse en mission, 2008, p.77

[3] Richard H. Niebuhr. Christ and Culture, Harper and Row, New York, 1975

Dans son travail, Richard essaye de montrer comment à travers l’histoire les chrétiens ont perçu la notion de culture. Cependant, comme tout travail intellectuel, le sien est critiqué, nomment par le Dr. D.A. Carson. Je pense qu’il y a aujourd’hui, notamment en Occident, une évolution par rapport aux cinq modèles présentés. Les chrétiens adoptent des points de vue suivant les contextes et situations.

[4] Conférence mondiale sur les politiques culturelles, Mexico City, 26 Juillet-6 Août 1982

[5] http://www.toupie.org/Dictionnaire/Culture.htm, consulté le 15 Juillet 2020.

[6] Matt. 13,14

[7] Gen.1.26 ; Matt.5.45

[8] Rom.3.12; Gen. 6.5; Jer. 17.9

[9] Rom. 12.2

[10] C’est aspect est abordé plus longuement dans la section sur l’art.

[11] Col.3.17. C’est moi qui ajoute les éléments de la parenthèse.

[12] Jn.16.33 ; 17.15 ; Rom.12.21

[13] Col.1.20 ; Eph.1.10

[14] Thibaud Naulet (dir.) L’art et la foi, Sacré-Cœur, 2010

L’art occidental se serait-il développé sans l’Église catholique ?

Delphine Meunier, compte-rendu de la venue de Marc Fumaroli à l’aumônerie de l’ENS le 25 mars 2010, autour de son livre,  Paris – New York et retour, voyage dans les arts et les images.

[15] Voir Gen. 1.27 et Ps. 139.14

[16] Apo. 7.9

[17] Ex. 31.1, 2; 35. 30-35

[18] Ex. 35 à 39

[19]Alfred Kuen. Qu’est-ce que l’art ? Quelle est sa relation avec la foi chrétienne ? https://www.servir.caef.net/?p=9409 , consulté le 15 Août 2020.

[20] Jean Calvin. Institution chrétienne II, 2.16

[21] L’histoire retient qu’au Vème siècle le Pape Grégoire le Grand est venu avec le concept « la Bible des illettrés ». L’art, comme par exemple les images et statues étaient considérées comme étant un moyen d’éduquer les fidèles. L’art avait une dimension pédagogique. A partir du XIIème et XIVème siècle, on est passé de la Bible des illettrés à la Bible des lettrés laïques.

[22] Op. Cit. p.22

[23] GREENE E. Albert. A la reconquête de l’éducation chrétienne : une vision qui transforme, Ed. ACSI-Francophonie, Hongrie, 2003, P.152

[24] Francis Schaeffer. L’art et la Bible, cité par David. Qu’est-ce que l’art chrétien ? 31 Août 2018

https://plumeschretiennes.com/2018/08/31/lart-chretien-existe-til/, consulté le 15 Août 2020.

[25] Cette citation est tirée de l’intervention du Rév. Wilfredo de Jesus au Sommet Mondial sur Le leadership de Willow Creek Association en 2017.

1 thought on “Une perspective biblique de la culture”

Leave a Comment

Your email address will not be published. Required fields are marked *