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La foi chrétienne et la science : Rencontre et harmonie

    Existe-t-il en réalité un fossé entre la foi chrétienne et la science? La Bible s’oppose-t-elle à la science? Nous vivons dans un univers très complexe, faisant l’objet de beaucoup d’études et de spéculations. Dépendamment de sa vision du monde, chacun, même le citoyen lambda, essaye de l’interpréter et se fait sa propre idée.

    Les scientifiques quant à eux cherchent à comprendre les phénomènes et à savoir pourquoi l’univers est si bien ordonné et pourquoi il existe une régularité dans les lois de la nature. Il s’agit d’une quête du pourquoi à partir du comment. Les philosophes et théologiens s’intéressent essentiellement à la question pourquoi. Si les philosophes ont tendance à refuser d’apporter des réponses aux questions posées, les théologiens chrétiens sont censés y apporter. Ainsi, le débat sur le mode de rapport entre la foi chrétienne et la science est on ne peut plus passionnant.

La cosmogonie chrétienne

    Le domaine qui s’occupe à étudier l’origine et la nature de l’univers comme étant un système bien ordonné s’appelle cosmogonie. De manière restreinte, selon l’avis de certains théologiens, la cosmogonie chrétienne exclut l’anthropologie (l’étude de l’être humain) et l’harmatiologie (la doctrine du péché) dans son champ d’étude. Elle les considère comme des domaines séparés.

    Il est important en tant que disciple de Jésus de pouvoir cerner à fond cette cosmogonie pour mieux comprendre Dieu, le Créateur. D’après H. Orthon Wiley et Paul T. Colbertson, la conception chrétienne de la cosmogonie comprend :

        1) une croyance en un Dieu tout-puissant, selon laquelle le monde a été créé de rien, uniquement par la volonté divine ; 2) le concept de Dieu dans la trinité de sa Nature ; 3) une manifestation des attributs de Dieu, l’omnipotence, la sagesse, et l’amour, et 4) la croyance en une création au moyen de la Parole divine.[1] 

    Pour mieux apprécier le mode de rapport existant entre la foi chrétienne et la science, un regard approfondi dans les différentes périodes de l’histoire s’impose.

La foi chrétienne et la science moderne

   De manière classique, les érudits divisent l’histoire en trois grandes périodes : le monde antique, le monde médiéval et l’âge moderne.

    D’abord le monde antique est considéré comme étant brillant, mais limité dans sa compréhension scientifique.

   Ensuite, le monde médiéval, qualifié d’âges de ténèbres et de désolation intellectuelle. C’est à ce titre que beaucoup de gens pensent que le monde, marqué par la foi, a été écrasé sous le poids occulte de l’Eglise. Par conséquent, c’est à partir de la renaissance, disent-ils, que ce monde a enfin pu se libérer.

    En fin, l’âge moderne, annoncé comme l’âge de la raison pour supplanter l’époque médiévale en la libérant de la superstition. Mais historiquement, est-ce que ça tient ?

    Nancy R. Pearcey et Charles B. Thaxon soulignent que la réhabilitation de l’époque moyenâgeuse a commencé avec les travaux du physicien et philosophe Français Pierre Duhem (1861-1916).[2] Duhem menait des investigations sur l’histoire de la Statique,[3] adoptant l’hypothèse largement admise selon laquelle le moyen-âge n’a rien apporté comme contribution à la science.

    Mais en creusant dans des sources historiques, Duhem a découvert le travail du scientifique de Jordanus de Nemore qui avait anticipé Leonard et Galileo dans son travail sur les fondations de la statique. Il a fini par être convaincu que l’époque médiévale a posé les bases de la floraison de la science. Ce n’était du tout pas une période de stagnation. Au contraire, la science moderne y tire ses racines.

    Cependant, étant catholique, beaucoup se doutaient des travaux de Duhem, pensant qu’il pouvait contenir des biais, surtout par le fait que cette période était dominée par l’Eglise catholique. Mais les historiens David Lindberg et R.N.D Martin ont pu démontrer qu’il n’y a aucune évidence pour montrer que le travail historique mené par Duhem était motivé par le désir de défendre le scholarcisme.[4]

    A partir de cela, les auteurs Nancy R. Pearcey et Charles B. Thaxton démontrent que plusieurs convictions chrétiennes sont responsables de l’avènement de la science moderne. Ils partent avec l’idée que la science est l’étude de la nature, et la possibilité de la science dépend de l’attitude avec laquelle on approche la nature. Je vous présente ces convictions en résumé.[5]

1) la Bible enseigne que la nature est réelle.

    Une telle conception prend le contrepied de différentes formes de panthéisme et d’idéalisme et des religions orientales, comme l’hindouisme. Cette dernière pense que l’univers est maya, illusion et le dénigre en conséquence.

    La nature est réelle et peut être étudiée.

2) La nature est bonne parce que Dieu l’a qualifié ainsi.    

    Cette conception prend aussi le contrepied de tout mépris de la matière. Dans le monde antique, notamment chez les Grecs, la matière étant méprisable. Le monde a de la valeur et le travail est honorable.

3) La nature est bonne, mais n’est pas un dieu.

    La nature a été créée. Elle n’est pas éternelle, contrairement à la perception du matérialisme scientifique. La nature n’est pas non plus une émanation de la propre essence de Dieu, comme le pensent le panthéisme et l’animisme.

    Dieu est le Créateur, non la personnalisation des forces naturelles ou l’âme qui habite le monde. A ce titre, l’historien Hollandais en science R. Hooykaas, cité par les auteurs, plaide pour la « dé-déification » de la nature, précondition cruciale pour faire de la science.

             4) Dieu est rationnel et le monde est ordonné.

    Contrairement au paganisme, le christianisme enseigne un seul Dieu transcendant, Créateur, dont l’œuvre est un univers unifié et cohérent. Ainsi, Derr, toujours cité par les auteurs, soutient: «  En tant que création d’un Dieu digne de confiance, la nature a fait preuve de régularité, de fiabilité et d’ordre. »

5) L’univers est régi par des lois qui peuvent être formulées et comprises avec précisions.

    L’univers n’est pas dirigé par des forces mystérieuses. Le Dieu de la Bible est le Divin Législateur, rationnellement intelligible. Il gouverne la nature par des décrets posés depuis au commencement.

    Force est de reconnaître que s’il n’y avait pas de précision dans l’univers, les mathématiques ne pourraient pas voir le jour. A ceci L’historien R. G. Collingwood, cité par les auteurs, exprime l’argument le plus succinctement en écrivant : « La possibilité d’une mathématique appliquée est une expression, en termes de sciences naturelles, de la croyance chrétienne que la nature est la création d’un Dieu omnipotent. »

            6) L’univers est intelligible.

    Si l’univers n’était pas intelligible, il ne pourrait en aucun cas faire objet d’études. Il a affiché un ordre connaissable. Les hommes peuvent découvrir l’ordre de la nature.

            7) L’univers est contingent.

    Dieu n’est lié par rien en dehors de Lui-même. Il est cependant lié par sa propre nature. Le monde n’a pas sa propre rationalité inhérente, mais il est intelligible car il reflète la rationalité de Dieu. Pourtant, parce que c’est de la rationalité de Dieu dont nous parlons et non de la nôtre, nous ne pouvons pas anticiper toujours comment elle se révélera dans la création.

8) Les hommes peuvent étudier l’univers parce qu’ils sont créés à l’image d’un Dieu transcendant.

    L’esprit humain peut transcender la nature et l’affronter comme sujet.

Contributions de scientifiques chrétiens à la science moderne

    Le fameux sociologue Américain, Rodney Stark, fournit une liste de 52 scientifiques qui ont contribué à des travaux importants dans la tradition scientifique moderne, indiquant que 50 étaient soit conventionnellement religieux, soit réellement pieux. 15 étaient des figures ecclésiastiques (prêtres, moines, ministres, etc.).[6]

    A Rodney de conclure que ces scientifiques étaient pour la plupart des théologiens. Parmi ces scientifiques chrétiens figurent Sir Isaak Newton, Louis pasteur, Michael Faraday, Francis Bacon, James Joule et Charles Babbage. Ce dernier, mathématicien et inventeur, est considéré comme « le père de l’ordinateur » pour son invention du premier ordinateur.

    Donc, selon Rodney, le christianisme occidental est bien à l’origine de la naissance et du développement de la science moderne, en tant que registre d’explication des phénomènes naturels, et en tant que processus cumulatif de construction théorique et de vérification de la théorie.[7]

    Un simple regard dans la galerie des Prix Nobel  dans l’espace de 100 ans nous permet de comprendre davantage le mode de rapport entre la science et la Bible ou la foi chrétienne. Scott Youngren, dans son article The many Christians crucial to science, nous offre des statistiques époustouflantes, basées sur l’ouvrage de Baruch Aba Shaley 100 Years of Noble Prizes :

Selon les statistiques compilées dans 100 ans de Prix Nobel, publiées en 2003, entre 1901 et 2000, un total de 654 lauréats de prix Nobel appartenait à 28 religions différentes. La plupart (65,4%) ont identifié le christianisme sous ses diverses formes comme leur préférence religieuse. Dans l’ensemble, les chrétiens ont remporté un total de 78,3% de tous les Prix Nobel de la paix, 72,5% de chimie, 65,3% de physique, 62% de médecine, 54% d’économie et 49,5% de tous les prix de littérature. Selon les statistiques de l’ONU, au cours des trois derniers siècles, parmi 300 scientifiques exceptionnels dans le monde, 242 croient en Dieu.[8]

                           Religion of Nobel Prize winners.png[9]

    Il y a lieu de conclure qu’il y a toujours eu une vision biblique de la science. Puisque Dieu est l’Auteur du livre de la nature et du livre des Ecritures, il revient à l’homme de science de s’assurer de bien faire sa science et à l’homme de théologie de bien faire sa théologie. Si chacun de son côté fait bien son travail, une harmonie parfaite entre la science et la Bible est la conclusion la plus logique.

Références biblique d’une perception chrétienne de la science

    En termes plus simples et clairs, quand nous étudions la Bible, telle qu’elle nous présente l’univers ou la création, nous y trouvons une conception tout à fait cohérente de la science. Conséquemment, en tant que disciples de Jésus, nous devrions avoir plusieurs attitudes.

    Premièrement, l’univers est bon (Genèse 1). Tout ce que Dieu a créé est bon. Après chaque acte de création, Dieu jugeait que ce qu’Il avait créé était bon. Dieu n’a rien créé de mauvais. Cette conception de l’univers nous permet d’apprécier tout ce que Dieu a créé et de Lui rendre toute la gloire qui Lui est due.

    Deuxièmement, l’univers est accessible aux humains et est intelligible (Gen.1 et 2). Dans son accessibilité et intelligibilité, nous ne devons pas avoir peur de la science ou la diaboliser comme beaucoup de chrétiens le font d’ailleurs. C’est carrémentirresponsable. Au contraire, nous devons l’étudier à partir des observations scientifiques. Car, en étudiant la création, nous pouvons mieux comprendre Dieu et la Bible.

    Dans Romains chapitre premier aux versets 19 et 20, Paul affirme clairement que tout l’univers porte l’empreinte de Dieu. Ainsi, tous les humains sont inexcusables devant Dieu.

    En étudiant l’univers, dans la pensée de Paul, nous pouvons remonter à son concepteur. Car les cieux racontent la gloire de Dieu et l’étendue manifeste l’œuvre de ses mains.[10]

    Nous ne vivons pas dans un univers parallèle et irréel. Voilà pourquoi, Dieu a donné à Adam l’intendance sur la création. L’une des tâches colossales qu’a réalisée Adam était de nommer les animaux. Pour se faire, il a fallu les catégoriser. C’était une activité hautement intellectuelle. Donc, nous pouvons affirmer que c’était le début des activités scientifiques de l’espèce humaine.

    Troisièmement, les œuvres de Dieu dans l’univers sont ordonnées, précises et ses lois régissant l’univers sont régulières, selon Jérémie 31 aux versets 35 et 36. Tout scientifique sérieux affirmerait que l’univers est très bien ordonné. Devant cet ordre impeccable, on s’étonne. Dieu a décrété des lois pour gouverner l’univers. Leur régularité permet de l’étudier et de remonter au Divin Législateur.

    En définitive, les chrétiens ne servent pas un Dieu qui se cache. Il n’est ni capricieux ou encore moins irrationnel. Dans sa sagesse infinie, Il a fixé des lois régissant le fonctionnement régulier de l’univers. Il domine sur tout.

    Créés à l’image de Dieu, nous sommes des êtres rationnels, dotés de capacités pour étudier l’univers et connaître le Créateur.

    Loin d’être un manuel de science, la Bible nous donne des pistes pouvant nous guider dans notre quête de vérité. Dans ce cas, il n’existe aucune contradiction entre la foi chrétienne (la Bible ou la théologie) et la science.

    Que chacun maîtrise son domaine et reconnaisse ses limites.


[1] Orton WILEY H. et Paul T. CULBERTSON. Introduction à la théologie chrétienne, Editions Fois et Sainteté, Kansas City, USA, 1991, p. 137

[2] Nancey R. Pearcey & Charles B. Thaxon. The soul of science : Christian faith and natural philosophy, Illinois, USA, 1994, p.6,7

[3] Partie de la mécanique qui étudie les rapports que les forces doivent avoir entre elles pour s’équilibrer. 36 Dictionnaires et Recueils

[4] Scholarcisme vient de l’anglais scholar, qui signifie savant, quelqu’un qui est spécialiste dans un domaine. Le scholarcisme désigne le cercle des savants ou érudits.

[5] Nancy R. Pearcey et Charles B. Thaxton, p. 9-24

[6] Richard Terell. Evolution: Really? : A Christian Humanist Inquiry into a Persistent Controversy, Westbow Press, 2011, p. 22.

Le livre de Rodney est: For the Glory of God: How Monotheism Led to Reformations, Science, Witch-Hunts, and the End of Slavery (Princeton, NJ: Princeton University Press, 2003)

[7] Christian Décobert, Archives de sciences sociales des religions [En ligne], 136 | octobre – décembre 2006, document 136-101, mis en ligne le 15 novembre 2012, p. 146. URL : http://journals.openedition.org/assr/4053

consulté le 18 Mai 2020.

[8] Scott Youngren, The many Christians crucial to science, posted on June 2, 2019. https://godevidence.com/2019/06/the-many-christians-crucial-to-science/. Cet article, ainsi que le lien suivant, a été consulté le 1 Décembre 2020. Traduit de l’Anglais au Français par l’auteur.

[9]https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/9/99/Religion_of_Nobel_Prize_winners.png

[10] Psaumes 19.2

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